N° 971 | Le 29 avril 2010 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

La République ou la burqa. Les services publics face à l’Islam manipulé

Dounia & Lylia Bouzar


éd. Albin Michel, 2010, (200 p. ; 15 €) | Commander ce livre

Thème : Religion

La prise de position des auteures est claire et sans hésitation : refuser la burqa, c’est être fidèle à la République, mais c’est aussi respecter l’Islam. Le port de cet accoutrement est le produit du prosélytisme de sectes fondamentalistes qui n’ont que peu à voir avec la religion musulmane. Pour autant, on aurait tort d’en rester à ce simple vêtement qui n’est que la partie visible d’un iceberg bien plus profond. L’école est le théâtre de bien d’autres manifestations : absentéisme sur une semaine au moment de la fête de l’Aïd, adolescents crachant par terre, au prétexte que le Coran leur interdit d’avaler leur salive durant le Ramadan, affiches déchirées ou barbouillées parce qu’elles représentent des figures humaines…

D’autres lieux sont aussi l’objet de revendications particularistes, comme des horaires de piscine réservées aux femmes ou des consultations hospitalières avec des praticiens féminins. À trop discriminer les jeunes d’origine maghrébine, notre société les a poussés vers une religion devenue un refuge. Certains jeunes hommes cherchent à mystifier le passé, pour mieux supporter un présent qui leur est si hostile. Certaines jeunes filles utilisent les enseignements du prophète pour s’opposer aux traditions et coutumes qui prétendent les tenir à l’écart des études, leur imposer un mari ou la virginité avant le mariage, toutes choses inexistantes dans le Coran. Les uns et les autres sont dans la quête illusoire du noyau authentique de leur foi, alors qu’il faut toujours contextualiser et historiciser la construction des normes, en fonction de chaque époque.

Aux tentatives de confessionnalisation de la société, on doit opposer la laïcité comme système permettant à tout le monde de vivre en commun, quelles que soient les identités de chacun. Comment gérer la diversité religieuse et respecter le droit fondamental à pratiquer sa foi, tout en refusant de se plier aux particularismes et de faire le jeu des dérives intégristes ? Les auteures proposent une méthodologie pertinente et efficace. La radicalité, expliquent-elles, est un processus amenant l’individu à s’auto-exclure de l’environnement social et à exclure les autres, en s’enfermant dans un système de valeurs centrées sur sa seule croyance.

Aussi, s’agit-il de mesurer le comportement ou la revendication problématique, à l’aune des effets qu’ils ont sur la capacité à aller vers l’autre ou au contraire à s’en éloigner, en fonction de l’adéquation qu’ils garantissent avec l’organisation sociale ou au contraire les dysfonctionnements majeurs qu’ils induisent dans le vivre ensemble, à partir de la faculté à introduire de la subjectivité ou au contraire à imposer un prêt à penser rigide et étroit.


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